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Il y a quelques jours nous avons lu cet article “L’Entreprise Libérée, entre communication et imposture“. À la fin de cette lecture, nous n’avions qu’une envie : témoigner de notre expérience et défaire les mythes que l’on voit trop souvent sur l’Entreprise Libérée.

Mais avant tout, il faut se demander ce qu’est une Entreprise Libérée. De quoi l’entreprise est-elle libérée ? C’est vrai, c’est devenu un “buzz-word”. Mais pour nous, l’Entreprise Libérée a un vrai sens, un sens humain, et nous travaillons à l’appliquer au quotidien (dans nos méthodologies de travail, d’échanges en interne et en externe, dans nos évolutions, nos prises de décisions, nos recrutements, etc). Lorsque nous parlons d’Entreprise Libérée, nous y voyons la libération du potentiel de chacun des membres de notre équipe. Exit le management traditionnel, exit la hiérarchie imposée. Nous avons choisi un autre modèle.

Les contres-vérités que l’on rencontre sur la question de l’Entreprise Libérée sont variées. Entre fantasmes, erreurs de jugement ou méconnaissances, on pourrait penser que l’Entreprise Libérée est une recette miracle pour guérir tous les maux de l’économie (ôtez vos managers et fonctions supports, puis égalisez vos collaborateurs en ajoutant une bonne dose de respect. Lorsque votre préparation est prête, enfournez le tout. Finissez en saupoudrant le tout d’un peu “d’agilité” et voilà, vous n’avez plus qu’à vous servir !).

Chez Fasterize nous construisons depuis 5 ans notre Entreprise Libérée. Et voici nos réponses aux 7 contre-vérités que l’on rencontre le plus souvent.

Les 7 principales contre-vérités sur l’Entreprise Libérée

1. L’Entreprise Libérée en opposition à l’entreprise traditionnelle

Pourquoi opposer l’Entreprise Libérée à l’entreprise traditionnelle ? Ne doit-il exister qu’un seul modèle ? Nous ne pensons pas qu’il en existe un meilleur que l’autre. Ce sont différentes façons de travailler et il appartient à chacun de choisir celle qui lui correspond le mieux.
Certaines personnes sont plus à l’aise et plus productives lorsqu’elles sont encadrées. L’évolution vers un poste de Manager en fait rêver plus d’un.

Malgré tout, on ne peut pas nier que le modèle traditionnel ne convient pas à tout le monde. Une étude de Gallup (reprise par Isaac Getz) indique que :
  • “61% des salariés sont « désengagés » dans l’entreprise, c’est-à-dire qu’ils viennent, font ce qui leur est demandé, mais sans entrain, et regardent souvent l’heure en attendant avec impatience le moment de partir.”
  • “28% des salariés sont « activement désengagés », c’est-à-dire que non seulement ils n’ont aucune motivation pour leur travail, mais en plus, ils passent leur temps à détruire la motivation des autres.”
Source : umana.fr

Cela explique en partie que beaucoup de salariés tendent vers plus d’indépendance et se lancent à leur compte.

Si nous avons des envies et des ambitions différentes, pourquoi faudrait-il qu’un seul modèle subsiste ?

2. L’Entreprise Libérée, une solution à tous les maux de l’entreprise

Lorsque nous entendons parler de l’Entreprise Libérée, c’est souvent pour lister tous les “bienfaits” que celle-ci a sur la profitabilité, l’engagement des collaborateurs, la motivation ou encore l’agilité.
L’Entreprise Libérée serait-elle une recette qu’il suffit d’appliquer pour guérir tous les maux de l’entreprise ? Nous vous arrêtons tout de suite. La réponse est non.

Revenons point par point aux “bienfaits” indiqués ci-dessus :
  • La profitabilité renforcée : si vous pensez devenir une Entreprise Libérée pour réduire les coûts, passez votre chemin ! Si cela a été le cas pour certaines entreprises qui ont changé de modèle, c'est que les managers et fonctions supports supprimés n'apportaient que peu de valeur. Dans le cas contraire, cette valeur est seulement créée autrement voire, si on s'y prend mal, perdue. Dans ce cas, les coûts pourraient augmenter.

  • L’engagement / la motivation : l’engagement fait clairement partie de l’Entreprise Libérée puisqu’on redonne la responsabilité des actions à chacun (en cas de succès ou d'échec).
    Certes, cette implication améliore la motivation. Mais attention, il implique aussi un poids supplémentaire sur les épaules.

  • L’agilité : ce n'est pas l'Entreprise Libérée qui rend agile une organisation. Mais elle est un prérequis pour toute entreprise qui voudrait suivre cette voie.
L'Entreprise Libérée n'est pas la recette du succès. Elle est une démarche qui se travaille quotidiennement et qu’il faut savoir adapter à sa société.

3. La suppression du management intermédiaire : une perte d’expertise

Il y a ici deux points importants :
  1. La suppression du management intermédiaire n’implique pas nécessairement la perte d’expertise.
  2. Chez Fasterize nous avons toujours nos experts : experts comptables, experts techniques, experts commerciaux, experts marketing etc. L’expertise est importante pour qu’une entreprise fonctionne bien. Loin de nous l’envie de nous en séparer.
    Mais cela ne doit pas pour autant créer des silos dans lesquels les experts se cantonnent à travailler sur leurs sujets.

    Par exemple, nous avons récemment décidé de faire évoluer notre site web. Quand bien même cela est une mission marketing, plusieurs profils (technique et commercial) ont spontanément contribué à l’amélioration du site web. Et cela, plus par intérêt pour le sujet que pour apporter leur expertise métier (ce qui diffère légèrement des équipes projet multi-compétences).

  3. Il n'est pas question de supprimer toutes les fonctions support et managériales.
  4. Aucune suppression n’est effectuée sans réflexion. Nous changeons simplement la répartition que tout le monde s'impose en diluant certaines fonctions auprès de nos collaborateurs.

    Dans notre cas, nous avons fait le choix de diluer les Ressources Humaines.
    Ici par exemple, ce sont les personnes qui travailleront avec la nouvelle recrue qui se chargent du recrutement. La fonction RH, dans notre cas, n’est plus alors l’exclusive propriété d’une personne. Nous faisons tomber les silos. Ce n’est pas un choix économique, mais un choix humain.

4. L’Entreprise Libérée c’est mettre tout le monde sur un pied d’égalité

On pense à tort que l’Entreprise Libérée est une démocratie, que “une personne = une voix”. Mais non, nous ne cherchons pas le consensus. Cela ne serait pas facilement adaptable et nous pourrions perdre en réactivité.
Si l’Entreprise Libérée devait s’apparenter à un régime politique, elle serait plutôt une “hiérarchie liquide” (cf. démocratie liquide). Ce n’est pas parce que tout le monde peut participer que tout le monde est légitime pour prendre n'importe quelle décision. Les décisions sont prises par les personnes les plus concernées et les plus compétentes en la matière. Cela permet d’être bien plus réactif.

Voici le processus de décision que nous avons défini conjointement au sein de l’équipe :
  1. Tout le monde peut prendre n'importe quelle décision.
  2. Le décisionnaire doit demander l'avis des personnes (qu'il juge) compétentes sur le sujet et les personnes concernées.
  3. L'étendue des personnes concernées dépendra (aussi) de l'importance de la décision (par exemple : une dépense peut concerner tous les collaborateurs, mais suivant le montant, il n’est pas utile de consulter tout le monde).
  4. Finalement, le décisionnaire décide seul en prenant en compte (ou pas) les avis des personnes consultées.

5. Entreprise Libérée = jeux de pouvoir

Pour certains, l’absence d’un responsable clairement identifié et disposant des moyens de réguler les dysfonctionnements fait de l’Entreprise Libérée un lieu propice aux jeux politiques.
Mais lorsque le pouvoir est réparti équitablement et est obtenu en toute légitimité (par expertise notamment), les jeux politiques n’ont plus lieu d’être.

Penser que l’Entreprise Libérée est une anarchie parce qu’il n’y a pas de managers, montre le peu de confiance que l’on peut avoir en l’Homme.
Dans l’Entreprise Libérée, la confiance est au coeur du fonctionnement.

Et le fondateur dans tout ça ?
L’Entreprise Libérée doit venir du fondateur. Il ne doit pas simplement y adhérer. Il doit être moteur, jouer le jeu et veiller à ne pas garder les pleins pouvoirs. Il en va de même à tous les échelons. Les actionnaires doivent eux aussi être inclus dans la prise de décision.

6. L’évolution au sein d’une Entreprise Libérée est impossible, voire inexistante

Souvent, on réduit l’évolution professionnelle à l’obtention d’un poste de Manager, un peu comme s’il s’agissait d’un grâal dans l'ascension sociale.
Alors certes, ceux qui ont ces ambitions verticales ne trouveront pas leur place dans une Entreprise Libérée.

En revanche, l’Entreprise Libérée facilite l’évolution fonctionnelle. Les silos n’existant plus, il est bien plus facile de passer d’un ensemble de tâches à un autre. Nous simplifions ainsi l’évolution horizontale.

Encore une fois, il revient à chacun de définir ce qui lui correspond.

7. L’Entreprise Libérée, une nouvelle forme de servitude

C’est paradoxal : plus on a de liberté, plus on peut se sentir “enchaîné” à l’entreprise. Les responsabilités (et les craintes qui peuvent les accompagner), la possibilité de travailler n’importe quand, n’importe où, peuvent être perçus comme une servitude de “devoir” travailler tout le temps. Les frontières entre vie privée et vie professionnelle peuvent vite se réduire, voire s’effacer. La servitude est effectivement un risque.

C’est pour ces raisons qu’il est important de gérer son temps et de maintenir un rythme soutenable. Chez Fasterize, nous y veillons, car travailler 70h par semaine n’est pas tenable dans le temps et la qualité de nos services pourrait en pâtir.

Qu’est-ce qui empêche une dérive ? La liberté (de s’organiser comme on le souhaite) et la confiance que l’on se porte. Sans cela, l’entreprise ne peut être réellement libérée.
Bien sûr cela implique deux choses :
  • il faut apprendre à être libre : nous devons chacun apprendre à ne pas nous laisser dépasser et à prendre le pouvoir qui nous est accessible. C’est un premier pas d’avoir le droit, mais encore faut-il savoir le prendre.
  • le recrutement est primordial : il est important que chaque nouvelle recrue adhère à l’Entreprise Libérée, y contribue et joue le jeu.
L’Entreprise Libérée est un territoire que l’on défriche chaque jour. Un territoire où parfois le Code du travail s’éloigne de notre réalité.
Par exemple, le Code du travail français ne permet pas d’accorder des congés illimités (pour des raisons d’assurance notamment). Or c’est une chose que nous souhaitons officialiser au sein de Fasterize. Charge à nous alors d’adapter le Code du travail.

L’Entreprise Libérée n’est pas une recette. Il ne s’agit pas de lister des ingrédients, de les jeter dans un saladier commun, de mixer tout cela et d’attendre.
Nous vous le disions au début de l’article : elle est une démarche. Une démarche qui peut certes être inspirée par d’autres Entreprises Libérées. Chaque idée ou bonne pratique que nous retirons de ces témoignages doit être adaptée à notre réalité, nos envies, notre fonctionnement.

A lire aussi : Comment l’Entreprise Libérée se vit-elle chez Fasterize ?